Pourquoi les agriculteurs aiment-ils les hivers rigoureux ?
Les hivers rigoureux se font de plus en plus rares. L’automne 2022 a été particulièrement doux, jusqu’à l’arrivée d’une période de gel à la mi-décembre. Un agriculteur doit-il se réjouir de voir arriver le gel ou pas ? Une chose est sûre : une période de gel intense présente des avantages non négligeables.

Structure du sol
On sait que le gel a un effet positif sur la structure des sols, en particulier s’ils sont argileux. L’eau présente dans un sol argileux se dilate (et se transforme en glace), ce qui désagrège les morceaux d’argile. À noter, toutefois, que quelques degrés de gel n’ont pas un grand effet. L’eau gèle plus vite que le sol argileux. Il faut donc un hiver très rigoureux pour que vous constatiez un impact, car le gel sera alors parvenu à pénétrer en profondeur dans le sol.

Pression des adventices
Les adventices germent moins lors d’un hiver froid. Les champs sont donc moins verts au printemps. Est-ce un avantage ou un inconvénient ? Difficile à dire… Il y a, en effet, plus de chances que davantage d’adventices apparaissent plus tard dans l’année. Les adventices et leurs graines ne meurent pas sous l’effet du gel. Certaines poursuivent simplement leur croissance quand les températures se maintiennent au-dessus de zéro degré. C’est le cas du mouron blanc, du séneçon commun et du cresson des prés. Il en va de même pour certaines graminées.

Impact sur la prévalence des maladies
Personne n’ignore que les hivers doux accroissent la prévalence du phytophthora dans les cultures de pommes de terre. Les tubercules contaminés qui restent dans le sol ou qui y sont infectés sont des sources précoces de contamination. En cas de fortes gelées, les tubercules gèlent et ce risque disparaît. Le gel tue également les spores de la rouille jaune des céréales, qui se propagent donc moins au printemps.

Le gel affecte, en outre, l’hivernage des pucerons. Lors des hivers chauds, les pucerons hivernent à la fois sous la forme d’œufs et de pucerons. En cas d’hiver froid, seuls les œufs survivent. Une bonne chose pour la culture des betteraves, notamment. La transmission du virus intervient plus tard, ce qui réduit le risque de jaunisse, une maladie virale transmise par les pucerons. Le gel peut également anéantir les sources du virus de la jaunisse, comme les adventices et le stockage des betteraves. La pression virale est également plus faible pour les cultures de bulbes et de pommes de terre après un hiver rigoureux.

Dommages aux prairies et aux céréales d’hiver
Les fortes gelées peuvent abîmer les prairies et les céréales. Mais le gel n’est généralement pas trop grave, a fortiori si les cultures sont recouvertes d’une couche de neige avant qu’il gèle. Les dommages surviennent principalement lors de fortes gelées, sur les parcelles qui présentent une mauvaise structure et qui ont peut-être subi des inondations précédemment. Les plantes risquent alors davantage d’être abîmées sous l’effet du gel.

Les hivers rigoureux sont-ils bénéfiques ?
Dans l’ensemble, les hivers rigoureux sont bénéfiques pour l’agriculture. Ils présentent des avantages considérables au niveau de la prévalence des maladies (champignons et insectes) et de la structure du sol (uniquement lors de gelées sévères et prolongées). En revanche, un hiver qui se prolonge jusqu’en mars peut s’avérer défavorable et entraîner, par exemple, un report des travaux de printemps, voire une période de croissance un peu plus courte. Nous avons rarement connu ces conditions, ces dernières décennies. Mais elles ne sont pas à exclure, en dépit du changement climatique.